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Dans un précédent article, nous soulignions les bénéfices d’une démarche de sourcing conduite préalablement au lancement d’une consultation.
Entre autres apports, un sourcing bien mené permet d’identifier les fournisseurs et solutions les plus innovants et ainsi de répondre à une attente toujours croissante des prescripteurs internes ou externes (i.e. Usagers/Clients).
De fait, la collaboration avec des tiers (notamment fournisseurs) innovants est le mode d’accès aujourd’hui le plus efficace et rapide à l’innovation. Il est souvent défini sous le terme d’innovation « ouverte » (open innovation).
A l’occasion d’une conférence tenue à Sofia en mai 2018, sur le thème « A renewed European Agenda for Research & Innovation », la Commission Européenne a publié un guide « Acheter innovant » (Guidance on Innovation Procurement[1]) notamment à l’attention des acheteurs publics. Ces derniers sont invités à ne plus uniquement se préoccuper du « comment acheter » (sécurisation juridique) mais à s’intéresser au « quoi acheter », au-delà de la satisfaction de leurs besoins primaires.
Tutelles, élus, usagers, ... perçoivent aujourd’hui la commande publique comme un véritable outil de politique publique et ont une exigence forte en matière de qualité, de délai ou d'impact environnemental, social et économique (RSE). Toutes choses apportées par des solutions innovantes.
Alors que seules 20% des entreprises françaises ont été invitées à innover par la commande publique en 2015 (source : Measuring the Link between Public Procurement and Innovation - OCDE, 2016 [2]), plus de 50% des entreprises hollandaises ou italiennes, et près de 70% des entreprises allemandes, indiquent avoir été « explicitement et formellement » poussées à innover par les donneurs d’ordres publics de leurs pays respectifs. L’écart est « conséquent » (doux euphémisme) et un biais méthodologique dans la conduite de l’étude ne peut seul l’expliquer.
Pourtant, le Pacte National pour la compétitivité, la croissance et l'emploi[3], publié en novembre 2012, invitait l’Etat à réaliser 2% d’achats innovants d’ici 2020. Objectif rappelé par Emmanuel Macron lors de ses vœux à la French Tech le 29 Janvier 2016.
"Partout en France, dans tous les secteurs, il faut mobiliser l'achat public de produits et services d'entreprises innovantes." Cette formule résume parfaitement le challenge de taille que les acheteurs publics doivent relever : faire de la commande publique un véritable levier d'innovation.
La définition retenue par le législateur est « Sont innovants les travaux, fournitures ou services nouveaux ou sensiblement améliorés. Le caractère innovant peut consister dans la mise en œuvre de nouveaux procédés de production ou de construction, d'une nouvelle méthode de commercialisation ou d'une nouvelle méthode organisationnelle dans les pratiques, l'organisation du lieu de travail ou les relations extérieures de l’entreprise » (Article 25 du décret n° 2016-360[4] reprenant le « Manuel d’Oslo »[5] publié par la Commission Européenne).
Fondamentalement, deux façons d’acheter de l’innovation peuvent être distinguées :
Dans le premier cas, l’acheteur public achète des services de recherche et développement. Il décrit ses besoins en invitant les entreprises et les chercheurs à développer des biens ou services nouveaux. Il peut également susciter l’innovation en matière de procédés mis en œuvre (modes de production ou de distribution) pour répondre au besoin.
Dans le second cas, l’acheteur public agit comme un adoptant précoce (« early adopter ») et achète un bien, un service ou un procédé qui est nouveau sur le marché et contient des améliorations substantielles.
Outre la volonté politique de soutenir les entreprises innovantes, l’accès à l’innovation est d’abord un enjeu de performance au bénéfice du donneur d’ordres et de ses usagers/clients. Il faut cependant accepter le principe que le recours à des solutions innovantes peut déstabiliser l’organisation, les processus et pratiques en place (innovation perturbatrice) ou même induire des changements plus structurels (innovation transformative).
Les principales procédures de passation que l’acheteur public peut utiliser pour favoriser l’intégration de solutions innovantes sont :
Ci-dessous le tableau récapitulatif de ces procédures, permettant de favoriser l’acquisition ou le développement de solutions innovantes :
Les acheteurs publics doivent conduire un changement de pratiques pour notamment dépasser plusieurs obstacles :
L’achat public innovant est un sujet complexe qui porte trop d’enjeux pour qu’il ne fasse pas l’objet d’un travail collaboratif associant l’ensemble des parties prenantes au sein du donneur d’ordres. La fonction Achats est évidemment toute légitime à exercer un rôle d’animatrice des projets de développement de l’innovation lorsque celle-ci est « ouverte ».
La valorisation de l’innovation doit être pensée au-delà des seuls gains d’image (« je soutiens l’innovation et m’affiche comme un bon élève »). La commande publique innovante doit générer des gains tangibles directs (Qualité, Coûts, Délais, RSE) mais aussi indirects (Satisfaction du Client final, Stimulation d’un écosystème et création d’emplois). Pour certains acheteurs publics (ex : Secteur de la Santé, secteurs spéciaux, ...), l’accès à l’innovation, c’est aussi la perspective de recettes additionnelles. L’approche n’est plus guidée par l’analyse des coûts (TCO) mais par l’analyse de la valeur créée (TVO).
L’apport de nouvelles méthodes Achats (ex : TCO/TVO) et de nouveaux outils informatiques (Tableaux de bord) permettent d’espérer que la mesure de la performance Achats ne soit plus un rocher de Sisyphe. Le recours à l’innovation peut être aujourd’hui mieux mesuré, donc justifié et incidemment mieux accepté.
Publications européennes :
En France :
La Direction des Affaires Juridiques a publié, depuis 2013, un guide de l’achat innovant. Ce document présente de manière plus approfondie les enjeux, contraintes et bonnes pratiques liés à l’achat innovant.
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