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Marchés Publics : ce qui a changé pendant l'été

SEPTEMBRE 2013
Nouvelle mouture des Directives européennes relatives à la passation des marchés publics, choc de simplification administrative présenté par le Gouvernement français et dispositions annexes, le droit des marchés publics n’a pas eu le droit à des vacances cette année.
En constante recherche de marges de manœuvres budgétaires et de nouveaux leviers de croissance, les achats publics ont été sujets à de nombreux débats ces derniers mois et ceci s’est soldé par l’adoption de nombreuses dispositions réglementaires. Les Institutions européennes, comme nationales (via la CIMAP,) ont en effet annoncé et amorcé de nombreuses réformes.
CKS vous propose un condensé de ces modifications, effectives ou à venir, pour vous mettre à jour en cette période de rentrée.

Nouvelle mouture des Directives européennes relatives à la passation des marchés publics, choc de simplification administrative présenté par le Gouvernement français et dispositions annexes, le droit des marchés publics n’a pas eu le droit à des vacances cette année.

En constante recherche de marges de manœuvres budgétaires et de nouveaux leviers de croissance, les achats publics ont été sujets à de nombreux débats ces derniers mois et ceci s’est soldé par l’adoption de nombreuses dispositions réglementaires. Les Institutions européennes, comme nationales (via la CIMAP,) ont en effet annoncé et amorcé de nombreuses réformes.

CKS vous propose un condensé de ces modifications, effectives ou à venir, pour vous mettre à jour en cette période de rentrée.

Si les sources de Droit sont différentes, elles convergent toutes vers deux objectifs principaux. Le premier relatif à la simplification des procédures de marchés, notamment afin de faciliter l’accès aux PME. Le second, venant consacrer l’achat public comme outil de politique publique, à la fois pour en faire un levier de croissance, mais aussi pour assurer des achats « responsables ». Si ces deux éléments ont été à l’honneur de la nouvelle version des Directives européennes, accompagnées par des dispositions nationales allant dans le même sens, force est de constater que le recours à la négociation, s’il est un peu élargi, ne permet toujours pas aux acheteurs de pouvoir adapter les offres des candidats à leurs besoins.

Favoriser l’accès des PME à la commande publique

L’accès des PME à la commande publique n’est pas un sujet nouveau. Tout le monde s’accorde en effet à dire, comme le révélait le rapport de CKS « 150 milliards, pourquoi faire ? 10 actions pour faire enfin de la commande publique un vecteur de croissance », que les PME sont les grandes perdantes des achats publics (ce constat est malheureusement singulier à la France), alors même qu’elles sont à la fois les plus créatrices de richesse, mais aussi d’emploi. D’ailleurs, de l’aveu même de la Commission européenne, dans une communication du 7 février 2013, la réglementation relative aux marchés publics fait partie du « Top 10 » des législations les plus contraignantes pour les PME. Etrange pour des dispositions prétendant assurer la bonne utilisation des deniers publics…

Si l’enjeu de l’accès des PME à la commande publique ne se règlera pas en une modification législative, la proposition de nouvelle Directive « Marchés publics » a au moins eu le mérite de faire de cet aspect un axe central de sa réflexion.

Cette nouvelle Directive avance d’un pas sur le chemin de la simplification administrative de la soumission aux marchés publics. Est ainsi opérée une réduction drastique de la documentation, notamment à travers le recours aux déclarations sur l’honneur. Seul le candidat retenu aura à fournir les pièces justificatives à l’appui de ses déclarations. Le Parlement européen, qui avait défendu l’adoption d’un passeport européen garantissant pendant une longue durée que l’entreprise détentrice était à jour de ses obligations, a dû réduire ses ambitions sur ce point et se contenter de ce principe d’auto-déclaration au stade de la candidature. Conjointement aux annonces à venir du Comité interministériel pour la modernisation de l’action publique (CIMAP), avec son « choc de simplification administrative », ces différentes mesures devraient largement libérer les contraintes liées aux marchés publics.

En outre, l’exigence relative au chiffre d’affaires pour démontrer sa capacité est allégée. Ainsi, un candidat devra, au maximum, pouvoir justifier d’un chiffre d’affaire égal à deux fois le montant estimé du marché, au lieu de trois initialement.

L’allotissement est par ailleurs désormais consacré au niveau européen, en reprenant le concept développé par le code des marchés publics français « Appliquer ou expliquer ». L’allotissement sera en effet la règle et les pouvoirs adjudicateurs souhaitant s’y soustraire devront le justifier. Si cette mesure ne correspond pas à l’ambition initiale, elle constitue toutefois une avancée notable dans la facilitation de l’accès des PME à la commande publique.

Enfin, la dématérialisation est encore à l’ordre du jour des modifications règlementaires. La Commission européenne a en effet présenté, le 26 juin dernier, une proposition de Directive relative à la facturation électronique dans le cadre des marchés publics, accompagnée d’une communication exposant sa vision de la «passation électronique, de bout en bout, des marchés publics », c’est-à-dire de la dématérialisation complète de la procédure de passation mais aussi de l’exécution, notamment financière. Baisse des formalités administratives, réduction des coûts de facturation et optimisation des délais de paiement, autant d’objectifs en totale cohérence avec la volonté de faire de la commande publique un vecteur de croissance.

De réelles avancées dans la poursuite d’achats socialement responsables

Le concept de « bonne utilisation des deniers publics » a souvent été interprété comme enjoignant les pouvoirs adjudicateurs à préférer les offres les moins « chères » économiquement. Consciente des enjeux politiques liés à l’achat public, notamment comme outil de politique publique, la Commission Européenne répond partiellement aux demandes, de plus en plus appuyées, de prise en compte des critères sociaux et environnementaux dans l’attribution des marchés. Dispositions qui renforcent le rôle de « levier de croissance » attaché à la commande publique. Soumis à des clivages, autant politiques que nationaux, les ambitions initiales de Marc Tarabella, eurodéputé belge, rapporteur du projet, ont quelque peu été diluées dans la version finale. Néanmoins, force est de constater que l’idée selon laquelle le pouvoir adjudicateur doit pouvoir prendre en compte la politique sociale et environnementale des fournisseurs fait son chemin.

La première mesure vise à obliger les entreprises répondant aux marchés publics de respecter les lois en matière d’environnement et en matière de travail (droit du travail et conventions collectives), sous peine d’être exclues. Si cette disposition va dans le bon sens, les moyens d’appréciation et de contrôle du pouvoir adjudicateur ne sont pas précisés et risquent de rendre cette disposition difficilement applicable. A cette nouveauté communautaire, nous pouvons ajouter une disposition plus spécifique. La ministre au droit des femmes, Najat Vallaud Belkacem, a en effet présenté, dans son projet de loi pour l’égalité entre les femmes et les hommes, une disposition visant à exclure de la commande publique les entreprises ne respectant pas l’égalité salariale. Une mesure faisant de l’achat public un moteur de la responsabilité sociale et environnementale des entreprises.

En outre, dans la droite lignée des dernières évolutions du droit européen, cette nouvelle Directive européenne vient consacrer le principe du mieux disant, rappelant que l’offre économiquement la plus avantageuse doit être choisie au regard d’autres critères que le seul prix. A cet effet, deux nouveaux critères de sélection des offres ont été introduits : le concept du coût du cycle de vie et la possibilité donnée aux acheteurs publics de prendre en compte le processus spécifique de production des biens, travaux et services achetés dans le choix de l’attributaire du contrat.

Dans la même veine, les règles de recours aux marchés réservés de l’article 15 du code des marchés publics ont été allégées. Le pourcentage minimum requis de salariés handicapés ou défavorisés a été réduit de 50% à 30%, facilitant ainsi les possibilités de recours à cette disposition.

Enfin, une nouvelle procédure de partenariat entre collectivités et entreprises pour l'innovation a vu le jour avec ce projet de Directive. Cette procédure permettra d'établir un partenariat structuré pour le développement d'un produit, de services ou de travaux innovants et d'acquérir ensuite les fournitures, services ou travaux résultants, à condition qu'ils correspondent aux niveaux de performance et aux coûts convenus. En facilitant le recours à l’innovation, cette mesure participe d’une volonté de faire des achats publics un levier de croissance (Aspect également développé par CKS dans son rapport sur la Commande Publique).

La négociation dans les marchés publics, le compte n’y est pas

S’il y a un acte manqué dans les nouvelles Directives, il s’agit certainement de l’évolution bien trop timide de la réglementation relative aux possibilités de négociation. Les débats qui ont entouré cette question ont été rudes et ont fait apparaitre plusieurs lignes de clivage. Deux arguments ont en effet été utilisés pour ne pas systématiser la négociation. 

Le premier est avancé par les organisations professionnelles représentant les intérêts des entreprises, notamment des PME. Elles ont fait part de leur désaccord quant à une extension du champ des possibles en matière de négociation, au motif que cette disposition avantagerait les grands groupes et leurs services commerciaux au détriment des PME. De fait, la proposition et la sélection, via des offres « intangibles », sans rencontre/négociation avec les candidats, est une barrière à l’entrée importante pour les PME face aux grands groupes, professionnels des réponses aux appels d’offres bien équipes en services Marketing et Vente. 

Les séances de négociation permettraient certainement aux PME de défendre leurs offres, leurs savoir-faire, expertises et atouts (proximité, délais, coûts de structures maîtrisés et donc prix compétitifs, …). Fondamentalement, la seule formulation des oppositions est erronée. Réduire la négociation d’un marché public aux seuls aspects commerciaux ne reflète pas la réalité des besoins des pouvoirs adjudicateurs. Plus qu’une remise commerciale, il s’agit de faire corréler les offres avec les besoins initiaux. Ce sont donc les aspects opérationnels qui sont importants en l’espèce et les PME ont ici leur carte à jouer. 

La position des Organisations professionnelles représentatives apparait dès lors « étrange » (Doux euphémisme). Celle-ci n’est ni en phase avec les besoins des pouvoirs publics, et plus grave, ni en phase avec la réalité et les atouts des PME. On peut clairement se poser la question des intérêts poursuivis par ces organisations professionnelles …

Le second est avancé par certains pays, au motif que les négociations viendraient rendre les procédures encore plus opaques et enlèverait de la sincérité aux procédures de marchés. S’il est évident que la négociation ne doit pas servir à avantager une société sur une autre, se cacher derrière cet argument n’est pas fondé. C’est le refus de la négociation qui rend le système opaque, autorisant implicitement les coups de téléphone ou indiscrétions qui perdurent dans de très nombreuses procédures, en dehors de tout cadre légal et sans respect pour les principes de la commande publique. Encore une fois, le sujet n’est pas d’institutionnaliser un « troc » quelconque, mais bien de permettre aux clients et aux fournisseurs de se rencontrer pour adapter les offres à la demande, dans des conditions économiques justes. On peut se poser la question de savoir si les motivations des pays d’Europe du Sud ou de l’Est, opposés à l’extension des possibilités de négociations, ne sont pas tout simplement contraires aux arguments qu’ils avancent. 

Alors que l’objectif initial était bien de systématiser la négociation dans les procédures de marchés, les nouvelles Directives se contentent d’ouvrir quelques possibilités supplémentaires pour le recours aux procédures négociées avec publicité et mise en concurrence. 

Ainsi, l’article 24 (e) de la nouvelle Directive dispose par exemple qu’il est possible de recourir à ce type de procédure « si, du fait de circonstances particulières qui se rapportent à la nature ou la complexité des travaux, des fournitures ou des services ou aux risques qui s'y rattachent, le marché ne peut être attribué sans négociations préalables ». Autant dire que le flou de la formulation n’incitera pas les acheteurs publics à utiliser cette possibilité avant que la jurisprudence ne vienne clarifier la notion de « circonstances particulières ». Par ailleurs, la dernière partie de l’article « (…), le marché ne peut être attribué sans négociation préalable », vient limiter très strictement les possibilités de recours, le pouvoir adjudicateur devant justifier de la  parfaite nécessité de la négociation. Les marges de manœuvre offertes pas ces modifications seront donc surtout liées à une appréciation large des juges européens et nationaux.

Face à ces modifications réglementaires, les acheteurs publics vont devoir relever les défis qui sont ceux de l’achat public. Maitrise des dépenses, qualité des achats et des services fournis aux citoyens, responsabilité sociale et environnementale. SI les réformes ne vont pas aussi vite que souhaité par nombre d’acteurs de la commande publique, les achats apparaissent doucement mais sûrement comme un axe central de la réforme de l’action publique et du service public. 

La mobilisation de tous les acteurs reste nécessaire. Réformes et moyens doivent être mis en face des déclarations d’intentions et ambitions affichées.

 

Sources :

RÉFÉRENCES CLIENTS