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Les règlements délégués de la Commission européenne fixant les seuils de procédure formalisée applicables aux marchés publics et aux contrats de concession ont été publiés au JOUE du 31 octobre 2019. Ils entrent en vigueur au 1er janvier 2020.
Ils modifient les seuils de procédure formalisée. Les seuils sont abaissés comme suit :
Depuis 2010, c'est la première fois que les seuils des procédures formalisées sont en baisse (-3,5% en moyenne). La fluctuation monétaire dans les flux entre Etats européens et OMC en est une cause. En effet, les seuils sont modifiés tous les deux ans en fonction de l’évolution du taux de change entre l’euro et les droits de tirage spéciaux (DTS) calculés à partir d’un panier de monnaies.
Par ailleurs, le Décret n° 2019-1344 du 12 décembre 2019 modifiant certaines dispositions du Code de la commande publique relatives aux seuils et aux avances relève le seuil de dispense de procédure pour la passation des marchés publics à 40 000 euros HT. L’article R2122-8 du Code de la Commande Publique est modifié en ce sens.
Cette modification de seuil entraine mécaniquement l’augmentation du seuil de dématérialisation des marchés publics et la publication des données essentielles sur le profil acheteur. Il existe néanmoins une particularité concernant les données essentielles. L’acheteur doit, pour les marchés situés entre 25 000 € et 40 000 € HT, publier au cours du premier trimestre de chaque année, sur le support de son choix, la liste des marchés conclus l’année précédente comprenant 5 données essentielles: objet, montant HT, date de conclusion du marché, nom de l’attributaire, son code postal ou son pays (s’il n’est pas établie en France).
Le Décret n° 2019-1344 du 12 décembre 2019 modifiant certaines dispositions du Code de la commande publique relatives aux seuils et aux avances relève également le montant des avances versées aux PME. Lorsque le titulaire d’un marché public ou son sous-traitant admis au paiement direct est une PME.
Le taux minimal de l’avance est porté à :
Le Décret 2019-1375 du 17 décembre 2019, relatif à la définition du seuil de présentation des marchés publics des collectivités territoriales et de leurs établissements publics au contrôle de légalité, est entré en vigueur le 1er janvier 2020.
Il s’applique aux marchés publics pour lesquels une consultation est engagée ou un avis d'appel public à la concurrence envoyé à la publication dès le 1er janvier 2020. Le Décret ne fait plus état d’un montant chiffré mais dispose que « Le seuil […] est celui qui s'applique aux marchés publics de fournitures et de services passés par les pouvoirs adjudicateurs autres que les autorités publiques centrales selon l'une des procédures formalisées au sens de l'article L. 2124-1 du code de la commande publique. »
Ainsi, le nouveau seuil de transmission au contrôle de légalité pour tous les marchés (FCS, travaux) est de 214 000 euros HT.
https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000039631164&categorieLien=id
La mise à jour a été réalisée afin de prendre en compte les nouveaux seuils européens des procédures formalisées, le relèvement à 40 000 € HT du seuil des procédures sans publicité ni mise en concurrence et l'augmentation de l'avance forfaitaire pour les grands acheteurs publics.
https://www.economie.gouv.fr/daj/conseil-acheteurs-fiches-techniques
L’Autorité souhaite porter une attention particulière à la lutte contre les pratiques anticoncurrentielles dans les marchés publics. En effet, les marchés publics sont particulièrement exposés aux risques d’ententes entre entreprises, qui causent un préjudice important aux acheteurs publics et affectent la bonne utilisation des deniers publics. Il s’agit d’une volonté européenne de lutter contre ce fléau. L’Autorité va travailler, en lien avec les services des ministères de l’économie et des finances et de l’action et des comptes publics. L’objectif est de mettre en place des outils permettant la collecte et l’analyse automatique des données de marchés publics afin de détecter de manière encore plus exhaustive et rapide les comportements collusifs.
L’Autorité restera notamment vigilante sur les chantiers relatifs aux infrastructures majeures nécessitant la passation d’importants marchés publics.
Les faits : Le 8 août 2018, la collectivité de Corse lance une procédure de passation d'une nouvelle convention de délégation de service public de transport maritime de marchandises et de passagers entre la Corse et le continent pour une durée de quinze mois.
Cette procédure fait l'objet d'un allotissement en cinq lots correspondant à chacune des liaisons maritimes. La société la Méridionale n’est pas acceptée par le pouvoir adjudicateur en phase de négociation pour les lots n°1 et 4.
Cette société saisie le juge des référés, sur le fondement de l'article L. 551-1 du code de justice administrative (référé précontractuel). En effet, elle demande à ce que ses offres soient déclarées recevables et à ce qu'il soit enjoint au pouvoir adjudicateur de l'admettre à participer à la négociation pour ces deux lots. La société La Méridionale se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 19 mars 2019 par laquelle le juge du référé a rejeté cette demande.
L’apport de l’arrêt : L’un des arguments de la société devant le CE est l’absence de respect du principe de confidentialité des offres du fait de la divulgation dans la presse d'éléments relatifs à son offre pendant la procédure. Argument qu’a rejeté le juge du référé en se fondant sur la circonstance que la collectivité n’était pas à l'origine du manquement.
Le Conseil d’Etat relève que les offres présentées par la société ayant été éliminées, la divulgation d'éléments de ces offres était insusceptible de l'avoir lésée. Mais le CE rappelle que si des informations confidentielles sur une offre sont divulguées dans la presse au cours d’une procédure de passation, l’acheteur est tenu de suspendre la signature du contrat afin d’apprécier si cette divulgation est de nature à constituer une irrégularité portant atteinte au principe d’égalité entre les candidats, et ce même si cette divulgation ne lui est pas imputable.
https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?idTexte=CETATEXT000038679156
(CE, 2 décembre 2019, Groupement de coopération sanitaire du Nord-Ouest Touraine, n°423936)
Les faits : Le groupement de coopération sanitaire du Nord-Ouest Touraine lance, par un avis d'appel public à la concurrence publié le 4 juin 2015, une procédure d'appel d'offres ouvert relatif à la fourniture de tous les éléments bruts ou cuisinés et produits consommables et l'exécution d'une mission d'assistance technique aux opérations de restauration, pour un nombre de repas annuel prévisionnel de 390 000 et pour une durée de douze mois renouvelable deux fois à compter du 1er septembre 2015.
Quatre sociétés remettent une offre. Le 31 juillet 2015, la société Valeurs Culinaires est informée qu'elle est classée en seconde position et que le marché est attribué à la société Sogeres. La société Valeurs Culinaires saisit le tribunal administratif afin d’annuler le marché conclu et demande la condamnation du groupement sanitaire à lui verser la somme de 209 292,60 euros correspondant à son manque à gagner sur trois ans.
L’apport de l’arrêt: le Conseil d’Etat apporte une importante précision sur la période qui doit être prise en compte lors du calcul du manque à gagner à hauteur duquel doit être indemnisé le candidat irrégulièrement évincé qui présentait une chance sérieuse de remporter le marché.
En effet, la Cour administrative d’appel, en accordant à la Société Valeurs Culinaires une indemnisation de 200.000 euros correspondant à son manque à gagner calculé sur une durée de trois ans englobant la période d’exécution initiale de douze mois ainsi que les deux éventuelles reconductions de même durée, commet une erreur. En effet, le Conseil d’Etat souligne que lorsqu’il est saisi par une entreprise qui a droit à l’indemnisation, il appartient au juge d’apprécier le manque à gagner uniquement sur la période d’exécution initiale du contrat et non sur les périodes ultérieures qui ne peuvent résulter que d’éventuelles reconductions.
https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?idTexte=CETATEXT000039442422
Les faits: Le Port Autonome de Nouvelle-Calédonie (PANC), établissement public à caractère industriel et commercial territorial (EPIC), organise une consultation, afin de conclure une délégation de service public (DSP). Saisi sur le fondement de l'article L. 521-24 du code de justice administrative par un candidat dont l’offre est rejetée, le juge du référé précontractuel, annule la procédure de passation de la DSP au motif que le PANC, qui possède 11% du capital de la SEM, a délibérément favorisé le candidat.
L’apport de l’arrêt: Le Conseil d’Etat annule l’ordonnance en fondant son raisonnement sur les points suivants:
Le CE rappelle que « le principe d'impartialité ne fait pas obstacle à ce qu'un acheteur public attribue un contrat de délégation de service public à une SEM locale dont il est actionnaire, sous réserve que la procédure garantisse l'égalité de traitement entre les candidats et que soit prévenu tout risque de conflit d'intérêts ».
Il considère ensuite que « la seule circonstance qu'un candidat se soit abstenu de solliciter des renseignements complémentaires avant la fin du délai de remise des offres n'est pas de nature à faire obstacle à ce que l'autorité concédante décide que des raisons objectives justifient la prolongation de ce délai ».
Le CE va vérifier que lors de la séance du Conseil d’administration du PANC ayant approuvé l’attribution du contrat, les administrateurs de la SEM n’ont pas participé aux débats ni au vote : les deux membres du conseil également administrateurs de la SODEMO n'ont participé ni aux débats ni aux votes sur ce point ».
Le CE vérifie ensuite si la prolongation du délai de remise des offres était objectivement nécessaire. En effet, même si c’est la SEM qui a saisi le PANC d’une demande de prolongation de délai, les deux candidats ont pu en bénéficier dans les mêmes conditions. Par la suite, ils ont été invités tous les deux à participer à la négociation. Dans ces conditions, le motif que la procédure aurait méconnu le principe d'impartialité est rejeté par le Conseil d’Etat.
Le Conseil d’Etat apporte ici des précisions sur le principe d’impartialité et rappelle l’importance du principe d’égalité entre les candidats dans le cadre d’une consultation.
Somme toute, la question du potentiel conflit d’intérêts, que peuvent rencontrer des élus qui seraient rémunérés tant par le pouvoir adjudicateur que par le titulaire du marché, semble ne pas avoir été traitée et rester entière ...
https://juricaf.org/arret/FRANCE-CONSEILDETAT-20191218-432590
Les faits: Le Conseil Départemental de l'Isère lance une procédure d'appel d'offres ouvert pour la passation d'un marché alloti de services réguliers de transports publics non urbains de personnes par voie terrestre.
Le pouvoir adjudicateur retient trois critères de jugement des offres, dont celui de la valeur technique pondérée à 25 %. La notation de l'un des deux sous-critères de la valeur technique, pondéré à hauteur de 20 %, dépendait uniquement du niveau de qualité que le candidat s'estimait en mesure de garantir. Le candidat devait lui-même s’attribuer une note dite « note de qualité » à l'aide d'un outil de simulation fourni par le pouvoir adjudicateur.
Le contrat est conclu avec la société Cars Philibert. Un candidat évincé sollicite la justice afin d’annuler ce marché et être indemnisé du préjudice résultant de son éviction. Le tribunal administratif ainsi que la Cour administrative d’appel de Lyon rejettent sa demande. Le Conseil d’Etat annule l’arrêt de la CAA de Lyon et condamne le Conseil Départemental de l’Isère à indemniser le candidat évincé.
L’apport de l’arrêt: Le CE rappelle que le pouvoir adjudicateur définit librement la méthode de notation pour la mise en œuvre de chacun des critères de sélection des offres qu'il retient et rend public. Toutefois, une méthode de notation est entachée d'irrégularité s’il est fait méconnaissance des principes fondamentaux d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures.
De fait, la méthode utilisée est de nature à priver de leur portée les critères de sélection ou à neutraliser leur pondération, ce qui a pour conséquence que la meilleure note n’est pas forcément attribuée à la meilleure offre ou que l'offre économiquement la plus avantageuse n’est pas forcément retenue.
Ainsi, une méthode de notation des offres par laquelle le pouvoir adjudicateur laisse aux candidats le soin de fixer la note qu'ils estiment devoir leur être attribuée est de nature à priver de portée utile le critère, en particulier si cette note ne peut donner lieu à vérification au stade de l'analyse des offres.
Outre le fait qu’il est demandé aux candidats de calculer eux-mêmes leurs notes, le juge a considéré que l’outil de notation utilisé par le Département ne permettait pas de mesurer clairement la qualité de service garantie par les soumissionnaires.
https://www.conseil-etat.fr/fr/arianeweb/CE/decision/2019-11-22/418460
Outre les règles de publicité au moment du lancement de la procédure de passation d'un marché public, l’autorité adjudicatrice belge est également tenue d'assurer une publicité de ses décisions d'attribution, de motiver ses choix et d’indiquer les délais de recours. Ces règles sont notamment régies par la loi du 17 juin 2013.
Avec la modification des seuils européens des procédures formalisées au 1er janvier 2020, un arrêté royal a été pris afin d’amender les seuils nationaux de communication des attributions.
Il est intéressant de constater que la loi belge est bien plus contraignante que la loi française, tant elle oblige le pouvoir adjudicateur à publier, pour les marchés atteignant les seuils européens :
https://www.publicprocurement.be/fr/documents/loi-du-17-juin-2013
https://www.publicprocurement.be/fr/documents/arrete-royal-du-20-decembre-2019
La présente loi s’applique à toutes les factures électroniques émises pendant l’exécution des marchés publics. L’objectif de cette loi est d’uniformiser les règles d’établissement des factures électroniques envoyées aux pouvoirs adjudicateurs par des entreprises.
Il y est notamment fait mention des informations indispensables que les fournisseurs doivent indiquer sur les factures, comme la référence du contrat, les instructions de paiement… etc.
Cette uniformisation permet, d’une part pour les pouvoirs adjudicateurs, d’avoir toutes les informations utiles en un seul document et, d’autre part pour les fournisseurs, de suivre un modèle unique pour l’ensemble de leur marché public. Cette loi s’inscrit dans la continuation de la simplification d’accès aux marchés publics.
http://legilux.public.lu/eli/etat/leg/loi/2019/05/16/a345/jo
Les faits : La commune de Ramincu Valcea, en Roumanie, attribue en 2014 un marché public de travaux à une société. En 2017, elle résilie ce marché car l’entreprise Delta ne respecte pas l’obligation de demander à l’acheteur son accord préalable sur le recours à la sous-traitance. Ce manquement a été publié, via le profil d’acheteur, sur la plateforme électronique nationale de passation des marchés publics. La même année, un autre pouvoir adjudicateur (CNAIR), dans le cadre de la passation d’un marché de travaux, prend connaissance de cette information et sollicite des précisions auprès de l’entreprise et de la commune.
Sur la base de ces éléments et du constat que la décision de résiliation n’a pas été annulée, la CNAIR rejette la candidature de l’entreprise Delta pour manquement grave aux obligations principales qui lui incombaient dans le cadre d’un marché public antérieur.
L’apport de l’arrêt: Dans le cadre du recours intenté par l’entreprise contre cette décision, la CJUE est saisie d’une question préjudicielle afin de déterminer si le manquement à l’obligation de déclaration et d’acceptation préalables du recours à la sous-traitance constituait ou non un des cas de défaillance importante dans l’exécution d’une obligation essentielle, visés au paragraphe 4 sous g) de l’article 57 de la directive 2014/24 et pouvait ainsi justifier l’exclusion de la candidature d’une société pour un nouveau marché public.
Dans son arrêt, la CJUE précise que l’existence d’une relation de confiance entre le pouvoir adjudicateur et l’entreprise attributaire suppose que le premier ne soit pas mécaniquement lié par l’appréciation portée par un autre pouvoir adjudicateur. Le pouvoir adjudicateur doit procéder à sa propre évaluation du comportement de l’opérateur économique et prendre en compte notamment l’importance des prestations irrégulièrement sous-traitées.
La CJUE indique en outre que dans une telle situation, la CNAIR doit apprécier si, en ne l’informant pas de la résiliation pour faute du marché antérieur, le soumissionnaire n’a pas commis l’irrégularité de dissimulation de renseignements. La Cour précise qu’avant de prononcer une telle exclusion, le pouvoir adjudicateur doit toutefois laisser la possibilité à cet opérateur économique de présenter les mesures correctives qu’il a adoptées à la suite de la résiliation du marché public antérieur. Si ces preuves sont jugées suffisantes, l’entreprise ne peut pas être exclue de la nouvelle procédure de passation de marché.
Les faits: Le gouvernement des Pays-Bas a prévu la mise en place d'une plateforme « centralisée » de passation dématérialisée des marchés publics. Cette plate-forme, TenderNed, créée et exploitée par le ministère de l’économie, de l’agriculture et de l’innovation, offre aux pouvoirs adjudicateurs et entités adjudicatrices néerlandais un service gratuit de publication des avis et documents de marchés, un module de dépôt des offres et d’échange entre acheteurs soumissionnaires, ainsi qu’un guide d’utilisation de l’application. Plusieurs sociétés, éditrices de plateformes de dématérialisation de marchés publics, déposent auprès de la Commission européenne une plainte visant à faire constater que le financement réalisé par le gouvernement en faveur de la création de la plateforme constituait une aide d’État illégale. La Commission européenne ayant pris une décision contraire, ces sociétés attaquent la décision devant le tribunal de l’Union européenne.
L’apport de l’arrêt: Dans un arrêt du 28 septembre 2017, le Tribunal rejette le recours en indiquant que l’activité en question, parce qu’elle ne se limite pas à une prestation de service de plateforme de passation des marchés publics mais qu’elle a aussi pour but de contrôler le respect du droit de la commande publique, se rattache à des prérogatives de puissance publique.
Elle n’est donc pas une activité économique par nature. Cet arrêt est confirmé par la Cour de Justice de l’Union européenne le 7 novembre 2019. En effet, la CJUE indique notamment que le périmètre global de la plateforme, composé de trois activités (publication, dépôt des offres, guide d’utilisation), compose un ensemble cohérent nécessaire à l’exercice de la prérogative de puissance publique et qu’aucun de ces éléments ne constitue, en la circonstance, une activité économique soumise au droit de la concurrence.
Plusieurs pays de l’UE ont choisi de centraliser la publicité et la dématérialisation des marchés publics sur une unique plateforme, cette jurisprudence confirme la légalité de cette approche et peut être de nature à donner des idées à d’autres pays ...
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