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L’analyse des candidatures est souvent pointée du doigt comme l’un des obstacles limitant l‘accès des PME et TPE aux marchés publics. Si cette phase est essentielle pour qualifier les fournisseurs et vérifier qu’ils disposent bien des capacités générales à exécuter la prestation, elle représente parfois une charge de travail disproportionnée au regard des enjeux pour les candidats comme pour les acheteurs.
Par le décret du 26 septembre 2014(1), plusieurs dispositions issues du « Choc de simplification » et des Directives européennes ouvrent la voie à un allègement des contraintes en phase de candidature : marchés publics simplifiés, limitation des exigences de capacité financière, partage de données entre administration…
Le décret du 25 mars 2016 continue l'ouvrage de simplification en phase de candidature.
Il vient confirmer certaines pratiques, par exemple l’interdiction d’imposer une forme de groupement mais la possibilité pour l’acheteur d’exiger, après l’attribution, de changer la forme du groupement si cela est nécessaire à la bonne exécution de la prestation(2).
Quelques souplesses sont accordées, telles, la possibilité de limiter le nombre de candidats(3). Ainsi, l’article 47 ouvre la possibilité d’une sélection des candidatures lors d’une procédure concurrentielle avec négociation ou lors d’un dialogue compétitif, a l’instar des possibilités offertes en appel d’offre restreint. Toutefois, il est précisé un niveau minimum de candidats, 3 pour les deux premières procédures et 5 pour la troisième(4). De même, le délai maximum de 10 jours pour régulariser sa candidature est remplacé par un « délai approprié »(5).
La liste des documents, qui peuvent être demandés aux candidats, a été précisée par un nouvel Arrêté en date du 29 mars 2016(6). Sans transformer profondément la liste précédente, cette nouvelle version donne aux acheteurs quelques indications afin qu’ils puissent proportionner leurs demandes aux enjeux du marché.
L’article 49-I du décret(7) (celui relatif au DUME) instaure une véritable présomption de capacité à exécuter. Lorsqu’il prévoit l’utilisation du DUME, « l'acheteur indique dans les documents de la consultation s'il autorise les candidats à se limiter à indiquer dans le document unique de marché européen qu'ils disposent de l'aptitude et des capacités requises sans fournir d'informations particulières sur celles-ci. En l'absence d'une telle mention, cette faculté n'est pas autorisée. ». Cette présomption facultative ne devrait pas être utilisée systématiquement. En revanche, elle est sans doute bienvenue si les risques attachés au marché sont réduits ou si une démarche préalable de sourcing a été conduite.
Les acheteurs seront obligés d’accepter une candidature présentée via le DUME à partir du 1er avril 2018 (1er avril 2017 pour les centrales d’achat). L’acheteur devra préciser s’il exige que le document soit rédigé en français.
L’article 55-II du décret permet plus de liberté dans le processus d’analyse des candidatures et des offres. En effet, s’il rappelle l’importance de qualifier les profils des entreprises candidates et vérifier qu’elles disposent des capacités requises, il n’impose plus que cette phase soit réalisée avant l’analyse des offres(8). En outre, les acheteurs « ne pourront exiger que du seul candidat auquel il est envisagé d’attribuer le marché public qu’il justifie ne pas être dans un cas d’interdiction de soumissionner »(9). Attention, cette dernière disposition est limitée aux interdictions de soumissionner. L’analyse des capacités techniques, professionnelles et financières doit donc concerner tous les candidats.
Au final, c’est l’article 68 du décret, qui définit les règles de passation pour les appels d’offres ouverts, qui ouvre la voie à un allègement de la charge de travail associée à l’analyse des candidatures(10). En effet, il est indiqué que : « L’acheteur peut décider d’examiner les offres avant les candidatures. Lorsqu’il fait usage de cette faculté, il s’assure que la vérification de l’absence de motifs d’exclusion et du respect des critères de sélection s’effectue de manière impartiale et transparente, afin que le marché public ne soit pas attribué à un soumissionnaire qui aurait dû être exclu ou qui ne remplit pas les critères de sélection établis par l’acheteur. ». Après avoir rappelé les possibilités offertes par l’article 55-II, il stipule que l’acheteur, s’il fait usage de cette faculté, doit s’assurer que « le marché ne soit pas attribué à un soumissionnaire qui aurait dû être exclu ou qui ne remplit pas les critères de sélection établis par l’acheteur ». Devons-nous donc considérer que l’acheteur peut opérer cette vérification pour le seul attributaire du marché ? La rédaction actuelle de l’article le laisse penser. Une inconnue subsiste, quelle analyse fera le juge administratif de cet article ?
Au-delà de la vérification des interdictions de soumissionner, la qualification des fournisseurs, via l’analyse des capacités techniques, professionnelles et financières (références, certifications, titres d’études, risque de dépendance économique, …) est stratégique. Elle permet de maîtriser les risques attachés à l’exécution de tel ou tel marché. Le niveau d’analyse des candidatures est donc indexé sur plusieurs critères que sont les risques internes et externes liés au besoin, le degré de connaissance du marché Fournisseurs, …
La phase des candidatures doit être proportionnée au marché, ses enjeux, ses risques.
(1) Décret n° 2014-1097 du 26 septembre 2014, portant mesures de simplification, applicables aux marchés publics, publié au Journal officiel du 28 septembre 2014
(2) Article 45 du décret du 25 mars 2016
(3) Article 47 du décret du 25 mars 2016
(4) Sous réserve d’un nombre de candidatures suffisant
(5) Article 55 du décret du 25 mars 2016
(6) Arrêté du 29 mars 2016 fixant la liste des renseignements et des documents fixant la liste des renseignements et des documents pouvant être demandés aux candidats aux marchés publics
(7) Article 49 du décret du 25 mars 2016 : Document unique de marché européen
(8) Si une phase de limitation des candidatures ou de négociation est précisée, l’analyse des candidatures doit avoir lieu avant (Article 55-II-3)
(9) Article 55-II-2 du décret du 25 mars 2016
(10) Cette disposition ne concerne que les appels d’offres ouverts
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